Gare H2 de Linde à Oakland, California

Le bus à hydrogène pour les lignes transfrontalières – une réflexion.

Paul Bristow, Klaus Röhrich, Harald Wirth, 25 novembre 2021

La technologie autour de l’utilisation de l’hydrogène avance rapidement. Aujourd’hui, le bus à hydrogène a l’autonomie autour de 300 km, assez pour une journée d’opération. Des multiples projets de transformation des lignes sont déjà réalisés. Pourquoi pas utiliser ces véhicules calmes et efficaces afin de transformer la ligne F entre Cointrin et Gex en transport vert ?

Le bus électriques à pile à combustible à hydrogène (« bus à hydrogène »)

Le premier bus à hydrogène  roulait en 1997 en Allemagne. Actuellement, les véhicules les plus fréquemment utilisés sont des bus de ligne standard d’une longueur d’environ 12 m. Il y a quelques dizaines de constructeurs mondialement, dont plusieurs en Europe : Safra (FR), van Hool (BE) et Mercedes-Benz (DE). Les premiers autobus articulés à pile à combustible d’une longueur de 18 m ont été mis en service pour la publique en 2019.

Les stations de ravitaillement sont disponibles de plusieurs fournisseurs, en France notamment des industriels du gaz comme L’Air Liquide ou Linde, mais aussi des entreprises spécialisées comme McPhy or Ataway par exemple.

En décembre 2019 huit bus à hydrogène Van Hool Exquicity étaient mise en service à Pau sur le BHNS Fébus. Le coût, véhicules et stations, s’élevait à 13 M€. Avec la commande de cinq bus BUSINOVA par Auxerre (projet EOLBUS) pour la ligne 1 du réseau LEO, le constructeur français Safra vient compléter les marchés déjà remportés à Lens, à Versailles, au Mans et à l’aéroport de Toulouse. Plusieurs agglomérations françaises ont manifesté leur intérêt pour cette technologie : Rouen et Toulouse on des projets concrète. Autres projets concernent les bus à hydrogène :

  • Châteauroux (projet Hyber : 6 bus de 12 et 18m)
  • Dijon (projet DMSE 2 : 27 bus de 12 et 18m)
  • Le Mans (projet H2Ouest : 10 bus pour la SETRAM)
  • Montpellier (projet MH2 : 21 bus hydrogène pour équiper 2 lignes)
  • Vert-le-Grand, Essone (projet Perle, 3 bus)
  • Lyon (projet Tethys : deux bus à hydrogène)
  • Chambéry (projet Zero Emission Valley : deux bus à hydrogène)

Les avantages du bus à hydrogène sont multiples :

  • Avec le bus à hydrogène on aura l’autonomie (autour de 300 km) pour une journée d’opération. Il ne sera, donc, plus nécessaire d’installations au long de la route (voir TOSA/Genève) et le bus peut être utilisée pour n’importe quel parcours. Cela est particulièrement intéressant pour une ligne transfrontalière.
  • L’avantage bus à hydrogène par rapport aux bus à piles est la courte durée de ravitaillement en dessous de vingt minutes (7 min. pour le Citaro de Mercedes-Benz), combinée à une autonomie relativement longue.
  • L’hydrogène (symbole chimique H2) est propre. Les émissions (particules fines, carbone, NOx) sont fortement réduite avec les bus H2 (comme avec les bus électriques d’ailleurs). La pollution acoustique est diminuée (-14 décibel à 20 km/h selon une étude de l’université Stuttgart de 2018).
  • L’hydrogène, si produite avec des énergies renouvelables, sera aussi renouvelables.

Les désavantages existent néanmoins. Le coût d’acquisition est plus élevé des bus à hydrogène (environ 625 000 euros) par rapport aux bus électriques à batterie (environ 550 000 euros et selon capacité de la batterie choisie). Les coûts d’acquisition d’un bus diesel sont d’environ 250 000 euros. Il s’ajoute la station-service (chiffres récoltés en 2020).

Le projet européen H2REF s’occupe du « Development of a cost effective and reliable hydrogen fuel cell vehicle refuelling system ». Au final, le coût global d’une station hydrogène passerait de 1,3 million d’euros à 950’000 euros. Le gouvernement français a récemment lancé un “plan hydrogène” dont le coût s’élève à 7 milliards d’euros d’ici 2030. Ce plan prévoit notamment la mise en place de 100 stations de recharge d’ici 2023 puis entre 400 et 1.000 avant la fin de la décennie. (L’Argus, janvier 2021)

Ligne F : Genève Cornavin (CH) – Gex ZA Aiglette (FR)

La ligne F (Gex – Ferney-Voltaire – Genève Cornavin, env. 14.9 km) fonctionne depuis 1997. Elle sera remplacée par le Bus à Haut Niveau de Service (BHNS) qui devrait être mis en place en 2021. Un bus de la ligne F fait en 18 heures de services environ 9 allers-retours, correspondant à environ 270 km par jour.

Actuellement, il s’agit d’un bus articulé (18 m Citaro G Diesel Euro 6) offrant 46 places assises, 117 places debout et une place pour personne en fauteuil, soit 163 places. La consommation diesel du Citaro est autour de 100 litres / 300 km, en ville plutôt 60 litres / 100 km. La ligne F offre, aux heures de pointes, un service toutes les 20 minutes entre Gex et Cornavin et toutes les 10 minutes entre Ferney-Voltaire et Cornavin, donc 12 voitures minimum pour couvrir aussi les heures creuses.

Comparaison pour une journée (bus de 12m, 300 km parcouru)

Consommation – Capacité – Émissions
Bus Diesel

(Citaro LE, 2019)

Bus électrique

(eCitaro, 2020)

Bus hydrogène

(Citaro BZH ou Businova de Safra, 2021)

80 – 150 litres Diesel

3-4 litres AdBlue

312 – 516 KWh (été – hiver)

 

15* – 40 Kg H2
260 l Diesel

27 l AdBlue

243 KWh

(146 – 441 KWh possible)

35 Kg @ 350 bar (Citaro)

30 Kg @ 350 bar (Businova)

(700 bar à venir)

213 – 399 Kg CO2
710 – 1330 g CO2 /km
16 – 41 Kg CO2
52 – 138 g CO2 /km
(50 à 80 g CO2 /KWh en France)
9 – 48 Kg CO2
30 – 160 g CO2 /km
(production H2: 50 KWh/ Kg; avec énergies renouvelables éolienne-solaire : 12-40 g CO2/KWh)

* Exploité sur différents itinéraires a Dublin, le bus de 12 m  Caetano H2.CityGold à couvert les 3000 kilomètres avec une consommation moyenne d’hydrogène de 5 kg pour 100 kilomètres. Belle performance puisque réalisée à une période où le chauffage des autobus fonctionne à plein ( H2-mobile.fr Janvier 2021).

Résumée

En comparaison avec le bus diesel, le bus hydrogène a des avantages de peu de pollution, réduction de bruits et utilisations d’énergies renouvelables sans perdre de l’autonomie et du temps du ravitaillement, les défauts du bus électrique. On pourrait très bien imaginer une programme de remplacement des bus des lignes BHNS, aujourd’hui encore la ligne F, à Ferney-Voltaire au fil du temps.

Une station-service avec électrolyseur pour la production de l’hydrogène devrait être alimentée avec d’électricité verte (panneaux photovoltaïques). Des telles stations pourraient être intégrées dans la ZAC Ferney-Genève Innovation (moitié du parcours), à Gex avec la Régie Départementale des Transports de l’Ain ou avec le Centre Technique de la commune (bout français du parcours) ou dans le Technoparc à Saint-Genis (dépôt de bus). Produit avec l’électricité solaire, le carburant hydrogène sera 100% “made in Pays de Gex”, nous rapprochant ainsi de l’objectif 2050 de Net Zéro.

Allons-y !